Notre titre fait référence à la revue Commentaire et en particulier à un article de Sylviane Agacinski dont l'intitulé est : Parenté et Sexualité: L'homoparentalité. (N° 119 / Automne 2007). Il ne s'agit pas pour nous de prétendre faire « taire » ou « tarir » les commentaires du commentaire qui, telle une étude talmudique, peuvent se déplier jusqu'à l'infini du côté du sens dans le registre imaginaire pour trouver son point d'arrêt au niveau du « grand interprète », …
Notre titre fait référence à la revue Commentaire et en particulier à un article de Sylviane Agacinski dont l'intitulé est : Parenté et Sexualité: L'homoparentalité. (N° 119 / Automne 2007).
Il ne s'agit pas pour nous de prétendre faire « taire » ou « tarir » les commentaires du commentaire qui, telle une étude talmudique, peuvent se déplier jusqu'à l'infini du côté du sens dans le registre imaginaire pour trouver son point d'arrêt au niveau du « grand interprète », c'est-à-dire Dieu lui-même. Cette écriture est pour nous une tentative de montrer, peut-être de façon présomptueuse L'instance de la lettre dans l'inconscient ( Voir Les Ecrits p.493) et aussi de donner une réponse préliminaire à « l' anonymat » dont nous parlerons plus loin.
La modernité, par la démarche cartésienne, remet en question les savoirs pour ne valider que des énoncés scientifiques ne tenant leur logique qu'en eux-mêmes, faisant fi de la dimension de l'énonciation. Malgré tout, Descartes a eu nécessité d'un référent pour garantir que deux plus deux égal quatre, selon la volonté de Dieu. Sa perfection nous garantit tant de son existence que de son mauvais génie. Après cette mise en place fulgurante, ce lieu de référence s'est vidé de sa substance au point d'apparaître un lieu vide pour nos contemporains mais malgré tout référent nécessaire à notre laïcité. Notre temps post-moderne tente de désavouer, de démentir cette place d'exception occupée antérieurement par la divinité ou par la figure du père (voir le livre de Jean-Pierre Lebrun La perversion ordinaire chez Denoël) au point que de nouvelles questions se posent dans l'esprit des lois et en particulier celles qui régissent la parenté puisque cet article de Sylviane Agacinski en débat.
L'auteure analyse les enjeux nouveaux posés par certaines revendications de militants homosexuels. La distinction qu'elle fait entre « parenté et parentalité », « sexe et sexualité » nous apparaît pertinente pour interroger l'institution du mariage et son éventuelle remise en question.
La parentalité est un mot récent qui vient supplanter la parenté et ses structures qui attribuent ainsi une filiation bilatérale aux enfants. Par contre, la parentalité serait plus d'ordre « éducatif » que « filial » et concernerait plus « l'autorité parentale » venue se substituer en 1970 à l'ancienne « autorité patriarcale ». A remarquer aussi que l'expression « autorité parentale » suggère une autorité partagée, sans dissymétrie, le phallus étant là d'ordre imaginaire, réparti équitablement entre les membres du couple ou bien passé à la trappe. Le terme « homoparentalité », néologisme récent (1990), est destiné à promouvoir le fait qu'un couple homosexuel, homme ou femme, aurait la possibilité juridique de donner à un enfant deux parents de même sexe et non le fait qu'une personne homosexuelle ait des enfants, ce qui n'est pas chose rare. Cela vient abolir l'institution du mariage basé sur la différence sexuée au profit de la sexualité et de son orientation, homo ou hétéro. La référence ne serait plus la différence des sexes (instituée sur le trait phallique dans la relation homme-femme) mais la sexualité et son orientation ce qui change toutes les données car si dans le premier cas, la filiation est respectée, dans le deuxième cas, elle est rompue si les parents sont de même sexe. Le phallus ne serait plus trait distinctif qui induit une dissymétrie des places mais trait unitaire et communautaire, sur le versant imaginaire, le « tout-phallique » ce qui pose autrement la problématique féminine qui dans sa différence se réfère cependant au phallus (la libido est d'essence « mâle » selon Freud) dans un « pas-tout phallique ».
Paradoxalement, il nous semble que l'institution du mariage homosexuel basé donc sur la sexualité et son orientation entraînerait une difficulté pour situer l'autre moitié des parlêtres dans leur propre existence, c'est à dire dans leur désir inconscient, désir marqué par cette référence phallique. Soit alors il leur faudrait se rattacher à la gente du « tout-phallique » au prix de perdre sa spécificité, soit inventer une essence propre qui différerait fondamentalement de celle du mâle, c'est-à-dire « faire exister La Femme » comme le disait Lacan. Nous savons bien que l'hystérie s'y emploie depuis belle lurette au prix de symptômes qui lui coûtent son propre désir.
Cette remarque que nous apportons se démarque de ce que Sylviane Agacinski considère comme dissymétrie. En effet, elle en parle mais à partir du biologique et non à partir du signifiant phallique qui donne une disparité des places alors que nous savons que le biologique n'a jamais pu déterminer une identité spécifique masculine ou féminine. Par ailleurs, sa conception du « Pacs » comme « pacte » puis comme « contrat » (p.757) nous démontre une fois de plus que ses références sont floues et qu'elle ne distingue pas le pacte du contrat. Si le pacte fait intervenir le tiers, l'Autre et se situe dans le registre symbolique, le contrat se fait entre deux « personnes », dans le registre imaginaire, « on s'arrange entre nous », ce qui est le fait du Pacs à l'encontre du mariage qui stipule la différence des sexes, donc l'intervention du tiers élément. C'est pourquoi un des députés de l'époque avait demandé de façon provocatrice s'il pouvait se « pacser » avec son chien ! Il n'est donc pas étonnant que celui-là prenne actuellement une telle ampleur puisque la « personne » est mise en avant, parité oblige, au détriment du sujet dans sa différence sexuée.
Nous ne suivrons pas S.Agacinski dans tous ses développements en particulier dans le fait de vouloir encadrer juridiquement ceux qui veulent élever des enfants ensemble, sans discrimination de sexe ou de sexualité, ceci pour sauvegarder le droit à chacun d'adopter un enfant et pour aussi l'intérêt de l'enfant. Ce couple, juridiquement encadré, ne pourrait pas être confondu avec un couple parental et pourrait fournir un nouveau modèle de relation familiale (p.758). On pourrait se demander, à vouloir différencier et légiférer si, au contraire, on n'ajoute pas à la confusion en accentuant le phénomène et de plus en donnant un statut légal à ces couples qui pourront dorénavant se prévaloir de la loi. Ce nouveau statut viendra sans doute supplanter ce qu'il prétendait défendre comme le Pacs et le mariage. Ajouterons-nous que le droit viendrait dicter une conduite éducative, l'autoriser alors que chacun sait qu'il doit y mettre du sien dans ce genre de relations plus ou moins complexes, c'est à dire se soutenir de son propre désir inconscient.
Un autre point nous paraît aussi litigieux quand elle parle de l'anonymat concernant par exemple les donneurs de sperme évoquant à ce sujet ces enfants qui cherchent désespérément leur père biologique du fait de cet anonymat suggérant par là qu'il devrait être levé. Si nous ne contestons pas ces faits cliniques (que nous n'avons pas rencontrés dans nos consultations), devons-nous en imputer directement à l'anonymat ? Ne serait-ce pas la défaillance de la mise en place du symbolique chez ces enfants qui les déterminerait dans cette quête impossible ? Nous savons que les enfants ont le bon génie de remettre en cause la légitimité de leurs parents en inventant un roman familial du fait que, eux, les petits princes et princesses, ne peuvent pas être nés dans cette famille de « tarés ». Il y a eu erreur et malversation et ils s'imaginent une famille plus grandiose, ceci dans le doute et l'incertitude, demeurant ainsi dans la normalité. L'anonymat du père biologique fait écho à notre avis à l'assertion bien connue «mère certaine, père incertain » en qui l'enfant doit faire foi car « on ne croit qu'à ce dont on n'est pas tout à fait sûr » (Jacques Lacan). Ceci donne au symbolique sa prévalence sur le biologique à l'encontre de cette recherche de paternité par les tests ADN. Aussi faut-il préserver à notre avis cet anonymat et, d'ailleurs, pourquoi dire à un enfant qu'il est né par insémination quand un père l'a adopté comme sien ? Nous savons bien que c'est le doute émis par l'un des deux parents qui est le plus traumatisant pour l'enfant et non ce soi-disant secret.
Voilà quelques remarques et digressions que nous avons apportées à cet article fort intéressant de Sylviane Agacinski comme amorce d'autres « commentaires ».