La pudeur est cette sorte de discrétion, de retenue, de modestie qui empêche de dire, d'entendre ou de faire certaines choses sans embarras.
Je partirai de la remarque suivante : pourquoi nous heurtons-nous parfois, avec les enfants, à une absence de pudeur - tant dans le discours des parents que dans la gestuelle entre l'enfant et ses parents ? Qui ne s'est trouvé, dans sa pratique clinique, confronté lors des premiers entretiens à l'attitude pudibonde dans le discours de l'enfant alors que dans le même temps il s'accrochait à la jambe de sa mère dans une activité des plus intimes ?
Nous avons souvent pu soutenir qu'il s'agissait parfois, dans les premiers temps, de faire advenir chez les tous jeunes enfants quelque chose qui pourrait s'apparenter au surmoi, voire qui ressemblerait à du refoulement. Mais pourquoi au surmoi : s'agit-il d'analyse, d'éducation ou bien encore de pédagogie ?
Du point de vue du psychanalyste, si à 4 / 5 ans, un enfant présente ce genre d'activité avec sa mère, en présence même d'un tiers, c'est que la fonction surmoïque n'est pas en place que la fonction paternelle n'est pas advenue. La visée de la cure est d'amener quelqu'un à sa juste place, ou du moins : tenter d'amener quelqu'un à sa juste place quant à la question de la sexuation. Mais quel rapport peut-il y « à voir », là, avec la question de la pudeur ?
Dans la leçon du 11 mars 1975 de RSI, Jacques Lacan remarque, concernant un petit film apporté par Jenny Aubry pour illustrer le stade du miroir, qu'il ne sait plus s'il s'y agit d'un garçon ou d'une fille, et se souvient seulement d'un bébé qui se regarde dans le miroir. Sans doute est-il dans les bras de sa mère. Outre la jubilation de l'enfant, et quelle que fut sa joie, quelque chose, un petit détail remarqué par Lacan, participe, nous explique t-il, à l'opération du stade du miroir. Je cite : « Ce stade du miroir, consiste dans l'unité saisie, dans le rassemblement, dans la maîtrise assumée du fait de l'image de ceci, que ce corps de prématuré, d'incoordonné jusqu'à là, semble rassemblé. En faire un corps, savoir qu'il le maîtrise, cela n'arrive pas, sans qu'on puisse bien sûr l'affirmer au même degré chez les animaux qui naissent murs que chez les enfants, il n'y a pas cette joie du stade du miroir, ce que j'ai appelé jubilation. Eh bien, il y a vraiment un lien, un lien de ça à ce qui était rendu sensible dans ce film par quelque chose qui, que ce fut un petit garçon ou une petite fille, je vous le souligne, avait la même valeur, l'élision sous la forme d'un geste, la main qui passe devant, l'élision de ceci qui était peut être le phallus ou peut être son absence. Un geste nettement le retirait de l'image. Et ça m'a été sensible comme corrélat, si je puis dire, à cette prématuration, il y a quelque chose dont le lien est en quelque sorte primordial par rapport à ceci qui s'appellera plus tard la pudeur, mais dont il serait excessif de faire état à l'étape du miroir. »
Cette observation de Jacques Lacan peut nous faire réfléchir sur ce que peut représenter la sortie du paradis pour l'enfant. En même temps qu'il reconnaît son image unifiée dans le miroir, anticipation d'un corps qui ne soit pas un organisme, mais où il entrevoit quelque chose de ce monde qui lui reste fermé de par sa prématuration, mais qui est là de par l'exigence de son élision. Il semble que, structuralement, dans cette phase du miroir, le phallus - par ce geste de l'enfant - soit mis hors corps. C'est-à-dire qu'il n'est plus chez lui pour autant qu'il n'est plus chez sa mère en la personne de l'enfant. Ce geste témoigne aussi peut être du fait que, malgré sa prématuration, l'enfant pressent que sa mère va lui échapper - pourvu qu'elle y consente. Pourquoi faut-il qu'elle y consente ? Parce que c'en est alors fini d'un certain type de jouissance où l'enfant n'avait de cesse de venir tenter - sur fond de leurre - de se faire l'objet de “toute sa jouissance”. Ce leurre, si nécessaire à un moment, devra désormais se jouer sur une autre scène : hors corps. C'est sans doute là qu'un enfant prend toute la mesure de l'Autre du langage… Mais, si ce phallus est hors du corps de la mère et de l'enfant, où est-il ? Où est ce qui intéresse maman ? Et qu'elle n'a pas ? Et que je n'ai pas ? J'aimerais bien que ce soit moi qui l'intéresse… Mais voilà : je ne suis pas « tout » ce qui l'intéresse….
Jaques Lacan remarque encore : le phallus, c'est le réel, et surtout le réel en tant qu'on l'élide. Dans son séminaire « La Relation d'Objet », à propos du petit Hans, il pose la question : pour l'enfant, quelle est la position intersubjective de celui qui — pour lui, et spécialement pour lui — remplit ce rôle d'assumer la position du détenteur de cet objet que ni la mère ni lui n'ont en leur possession, c'est-à-dire le père (ou celui qui remplit cette fonction) ? A la naissance de sa sœur Anna, Hans, dans une jalousie toute augustinienne, va demander d'où viennent les enfants. Il demande qui, sur cette terre, a cet objet passé dans le réel ? Organe donc. Non pas ce « wiwimacher » qu'il a, à la différence de sa sœur Anna. Mais les « faits pipi » de tous les êtres vivants. A sa mère : « J'avais seulement pensé… ». A son père : « Les lions ont un fait pipi, je l'ai vu ! » . Hans, cependant, marque nettement à sa mère que le sien devrait se voir… Il la guette et lui déclare que, si elle devait en avoir un, il devrait être aussi grand que celui d'un cheval. Aussi grand que l'amour qu'il lui porte. Et c'est de sa jouissance à l'être, ce phallus, et à vouloir le rester, qu'il nous parle. Mais ce phallus dans le réel, qu'est ce que ça peut bien recouvrir ? A une certaine époque, sa mère lui avait répondu qu'elle en avait un comme le sien. Et ce fameux cheval sera bientôt devenu l'objet de sa phobie.
Nous sommes dans un temps d'avant le déclenchement de sa phobie, et il n'est pas rare que Hans aille rejoindre sa mère dans son lit ou l'accompagne aux toilettes. Par ailleurs, il reçoit la meilleure éducation qui soit, ni trop rigide ni trop débridée. Cet enfant très précoce dans la parole bénéficie seulement peut être d'un peu trop d'explications ou de sens donné à toutes choses… Freud en fait la remarque à son père. Et sa remarque me permet de me demander si le « trop de sens » ne contribue pas, dans l'éducation des enfants, à annihiler la fonction de pare excitation des parents. Il aurait du coup pour conséquence de prolonger ce jeu de leurre du troisième temps de la pulsion. Sans doute y a-t-il plusieurs raisons à cela. Mais Hans qui grandit ne se trouve-t-il pas précipité dans l'angoisse du peu de choses à offrir à sa maman qui attend désormais un deuxième enfant ? Et l'angoisse manifestée par certains enfants, et l'excitation pudiquement dénommée hyperactivité, n'est-elle pas sans lien avec tout ceci ?
Je reçois une petite fille d'à peine trois ans. Elle parle comme un livre et n'arrête jamais de parler. Hyperactivité langagière ? Toujours est-il que cela devient épuisant pour ses parents qui ne cessent, eux, de répondre à toutes ses questions… Inutile de penser qu'elle peut s'endormir avant de nombreuses histoires et explications - et tout particulièrement depuis que sa maman attend un enfant. C'est toutefois la survenue d'un symptôme encoprétique, qui oblige sa mère à lui remettre des couches, qui motive la consultation. Ce que cette petite fille m'a dit, en présence de sa mère, après que je lui ai posé la question de savoir d'où venaient les enfants, je n'ai pas besoin de vous le dire. Cela a donné lieu à un dessin dans lequel de petites crottes, au milieu d'un cercle, étaient ses enfants. Tout ceci ayant été dit par elle à sa mère à voix basse, et redit par cette dernière dans le temps de la séance. Faut-il deviner d'où sortent les enfants ?
La séance suivante, alors que la maman soulignait que sa fille jouait sans cesse à la maman, depuis la dernière séance, avec ses poupées et ses doudous, cette petite fille a demandé à sa maman si, au moment ou elle enlèverait sa couche, elle aurait « des poils à son sexe comme maman ». Ce sont là, textuellement, ses propos. Propos bien sûr à l'oreille de sa maman - répétitrice appliquée… à mon endroit. Je lui ai demandé comment elle savait cela à propos de maman ? « Parce que je l'ai vu ! ». J'ai alors demandé si elles prenaient leur bain ensemble ? « Oui »
« Et avec papa ? »
« Oui ! Mais papa met un maillot ! » a précisé maman en rajoutant : « Je devrais peut être faire la même chose ! »
« Oh non ! » a dit tout haut l'enfant. Moi, je n'ai rien dit durant cette séance. Mais la petite fille a dû percevoir un certain étonnement dans mon regard.
La séance d'après, je suis revenue sur ce « Oh non ! ». Disons que je l'ai interrogé, et que la réponse a été des plus surprenantes - pour la maman comme pour moi -, et je dois ajouter très amusante…. Ma question sur ce « Oh non ! » était de la plus grande impertinence. Et elle m'a répondu :
« Je ne pourrai plus le toucher ! »
Sa mère : « Comment, je n'ai pas bien entendu ? »
« Je ne pourrai plus penser à le toucher ! ».
Voilà un exemple qui n'est pas sans rappeler l'impertinence du petit Hans ! Et ce qui se manifeste là évoque une théorie sexuelle infantile. Je ne sais comment vont évoluer les choses, mais on a le pressentiment que, pour que les choses s'arrangent quant à ce symptôme gênant, pour cette petite fille qui ne met des couches qu'au moment ou elle doit aller aux toilettes pour le « caca » et qui, le reste du temps, porte la « culotte », quelque chose devrait chuter. Quelque chose qui puisse garder un caractère d'énigme, un point de non savoir qu'elle semble avoir du mal à mettre en place.
Il m'a été possible de le lui formuler à propos d'un nouvel embêtement qui s'est présenté à elle quand elle a appris que le bébé à venir était un petit garçon. Maman avait, disait-elle, « demandé le sexe du bébé ». Quelle bonne surprise pour la fillette…particulièrement dépitée. Cet épisode m'a tout au moins permis de lui dire que l'on pouvait savoir bien des choses mais que, concernant les bébés, l'on ne pouvait pas choisir d'avoir une fille ou un garçon ; qu'un homme et une femme pouvaient choisir d'avoir des enfants, mais aucunement si le bébé serait fille ou garçon ; que ses parents, à elle, n'avaient choisi ni pour elle, ni pour le petit frère à venir.
Rien de bien grave, ici, et la mise en place de la pudeur, le rappel de l'élision d'un certain objet, peut apaiser une série des embêtements éprouvés devant l'éternelle question « d'où viennent les enfants ? » - soit la question même venant consacrer la « sortie du paradis… ». Avec cette petite fille, nous assistons à un progrès dialectique d'une séance à l'autre. Il y a ce questionnement de sa maman, à laquelle je ne me suis jamais permis le moindre commentaire, — maman qui a écouté ce que disait sa fille, et l'a entendu, et ce questionnement contribue à un certain apaisement chez sa fille et à la possibilité pour elle de barrer quelque chose de ce savoir que, comme tout enfant, elle a placé chez sa maman, cette maman attentive à ce qu'elle soit la plus avertie possible des choses de la vie….
Je vais évoquer maintenant le cas d'un jeune homme que le manque de pudeur - en ce lieu de la parole, ce lieu du « qu'elle n'eut cru » ou du « qu'il Nu cru » - semble avoir contraint à trouver des réponses dans un forçage quant à l'identité. Un jeune homme dans l'air du temps, sur le mode de revendications quant à la nature qui vous aurait fait comme ceci ou encore comme cela… Avec ce paradoxe que « dame nature » vous ferait, justement, fille ou garçon…. Pour ma part, je ne sais de quoi il retourne… et ce jeune homme ne semble pas le savoir non plus. Mais comment se fait-il qu'on en parle aussi facilement, et d'une telle façon, au sein d'une famille ?
Ainsi j'ai rencontré, et rencontre encore, un garçon de seize ans aujourd'hui que ses parents m'avaient enjoints de « guérir » du mensonge dont il souffrait - « Il n'arrête pas de mentir ! » - comme, également, d'une agitation perdurant depuis sa prime enfance. J'ai rarement entendu propos aussi crus de parents touchant leur fils, et cela m'a fait craindre des problèmes bien plus graves que les « tocs » longuement décrits par ces mêmes parents avec maints détails. Je l'ai reçu dans les conditions prévues par… eux : une fois tous les quinze jours… Et il a fait un travail que je qualifierais de mise à distance d'un langage tout aussi cru que celui de ses parents, notamment à l'endroit de sa sœur cadette, fille assez « débridée » selon les termes mêmes de ses parents. A la maison, tout et n'importe quoi pouvait se dire, être mis à « nu ». Tout, et surtout les crises de jalousie qui éclataient régulièrement entre les parents mais également entre le frère et la sœur… Maniéré qu'était ce garçon (selon les termes des parents), sa sœur le traitait vulgairement de « p…! », cependant qu'il la traitait tout aussi vulgairement de «p… ! ». Je passe sur les mots employés… Comme je l'avais fait remarqué, ça commençait par cette même lettre qui se trouve être la première lettre du mot « père ». Et c'est ce que j'entends mieux aujourd'hui, en l'écrivant.
Dernièrement ses parents sont venus me trouver pour me faire part d'une crise beaucoup plus grave puisque le père me regardant droit dans les yeux m'a dit :
« Mon fils m'a dit qu'il était « p… » ! »
« Ce sont les termes qu'il a employés ? »
« Non, a rajouté la mère, à l'école on le traite de « p…», mais, lui, nous a déclaré qu'il était homosexuel, qu'il fallait qu'on s'y fasse.»
« N'est pas homosexuel qui veut, et je suis étonnée que cela fasse l'objet d'une discussion familiale. Pour ma part, je vous demanderais de mettre des bémols à ce genre de déclaration, et de rester le plus discrets pour l'instant - quoi que vous en pensiez ! »
Le père : « J'ai toujours pensé qu'il était homosexuel. »
La mère : « Moi aussi »
« Et bien, pas moi ! Et on peut avoir, à l'adolescence, ce genre de questionnements, voir ce genre d'expériences. Et je me pose la question de pourquoi vous le dites, et comme cela ! »
«Vous savez, il menace aussi de se suicider… ! »
« Et bien dites lui de venir me parler de tout cela, mais arrêtez de faire des débats familiaux ou tout le monde s'en mêle - y compris sa sœur… ! »
« Il faut voir comme il en parle de sa soeur ! »
« Et bien interdisez leur de telles conversations ! »
Au point ou nous en sommes aujourd'hui, ce jeune homme pense que sa « déclaration » n'est pas définitive…. Mais il écoute, m'a-t-il dit, et sans doute depuis longtemps, ces radios dont je tairai le nom, radios relayées par les sites Internet où l'on rencontre qui l'on veut. Il est d'accord pour reconnaître qu'il est trop jeune pour une quelconque expérience. Il connaît ma position, qui est de l'inviter plutôt à me parler de ses difficultés et d'essayer de réfléchir à pourquoi on peut parler comme ça chez lui, et pourquoi il parle comme cela, chez lui ou ailleurs. Ce qu'il me répond c'est que tout le monde au lycée parle comme cela.
« Comme chez vous ? Je ne crois pas. »
Reste que ce « savoir » sur Internet semble être identifié par lui comme normal. La pornographie est aujourd'hui la façon « normale » dont les adolescents sont enseignés des choses de la sexualité, et il est malvenu de ne pas être au courant…. Qui plus est, c'est bien au niveau de l'être que les critères de ces tests posent la question : « Hétéro ? Homo ? Bi ? ». Et de savoir comment ils pourront «jouir le mieux selon leur nature, leurs goûts »…
Au reste, les adolescents ne sont pas contredits par leurs parents qui eux-mêmes, parfois, ont recours à ce genre de divertissements et de test de personnalité que l'on retrouve d'ailleurs dans des magazines très «sérieux». Ce que ce garçon pourrait me dire qui le concernerait d'un peu plus près est en constante rivalité avec ce nouveau savoir qui fait vérité à l'endroit même où se produit, pour lui, un effet de nomination. Par ailleurs, il faut remarquer qu'exception faite des rares fois où il lâche à ses parents ce « je vais me suicider ! », il n'y a pas dépression apparente ou sentiment d'étrangeté chez lui. Il ne rate jamais un rendez-vous et la teneur des séances est plutôt sérieuse.
Si je me réfère à ce qu'il a pu me dire au cours de séances, ça n'est pas la première fois qu'il se sent dans la peau d'un autre ou mieux : de quelque autre entité appartenant à un autre quelqu'un d'autre. En septembre 2001, il s'est senti américain. Il « était » américain et il le disait à tout le monde ! Il connaissait parfaitement la langue et il s'y appliquait. Et c'était au point que ses parents, devant une telle insistance, l'ont emmené en vacances aux Etats-Unis pour le récompenser de son travail scolaire… Son voyage a été terrible. T ne pouvant calmer sa phobie de l'avion, une angoisse sans nom… aux dires de ses parents.
Pourquoi tout cela à propos du « nu » ? Parce que je me demande encore aujourd'hui si la crudité des propos est réservée aux grands fous et aux seuls enfants psychotiques. A ceux qui, précisément, nous posent la question d'une pulsion qui serait hors sexuel, et donc hors langage. Car un autre jeune homme, phobique, me demandait dernièrement pourquoi dans l'album photo de la famille, la première photo montrait ses parents tout nus. Il me disait également qu'il entendait parfois ses parents, et qu'il trouvait qu'ils étaient trop vieux pour « faire l'amour ». Plus vieux que sur la photo, n'est-ce pas ?
Je crois qu'à travers ces exemples on voit bien comment la pudeur, vertu ancestrale, progrès civilisateur dans l'histoire de chacun et dans l'histoire de l'humanité, vient marquer ce qui prend valeur de civilisation. Elle semble aujourd'hui perdre de sa valeur au profit d'un savoir sur la « nature scientifique des choses de la vie ». Les parents qui n'arrivent pas toujours à répondre de ce côté là, voire refusent, sont relayés par des moteurs de recherche sans états d'âme. S'il y a abandon des parents, c'est sans doute au regard d'une certaine timidité devant ces « progrès sur tout savoir ». Mais parfois cela vient aussi rejoindre leur propre passion au regard de « l'être ». De cette passion, nous ne sommes pas à l'abri. Elle peut pousser aux choix les plus aberrants au nom d'une jouissance qui ne saurait s'arrêter à ce qu'il y a de plus sacré chez un enfant, à savoir cette élision du phallus ou ce manque qui est là et doit pour autant advenir. Devant cette nature scientiste où le corps est détaché de l'âme et ne vaut plus comme enveloppe de l'objet perdu ou de ce qui vient représenter, pour chacun, cette perte toujours voilée, on peut se demander quelle place peut prendre un enfant dans une famille. Cette place qu'il a, mais à laquelle il devrait advenir en toute pudeur, cette place où il a été reçu à sa naissance tout « nu ». Il est beau à croquer nous dit-on… Toute la question est qu'il ne le reste pas. Nous pouvons donc nous poser la question de savoir si une société qui consomme ses enfants, nous en avons l'exemple avec les abus sexuels, n'a pas à voir avec cette dichotomie entre le nu et la pudeur aujourd'hui.