J.-J. Tyszler
Le fantasme n’est pas que la petite scénette ou rêverie érotique à laquelle on pense. Ce mot clef permet de creuser un écart entre le sexuel proprement dit et la sexualité humaine. Freud en donne un exemple magistralement articulé dans son texte On bat un enfant ; la partie la plus importante de l’arrangement grammatical du scénario n’est pas un souvenir mais une construction dans et pour l’analyse : « Je suis battu par mon père » ; derrière l’imaginaire il y a un réel que le travail associatif de la cure fait surgir. Est-on quitte aujourd’hui de cette lecture toujours ramenée à la grille œdipienne ?
Lacan ajoutera à cette logique du fantasme les péripéties et les métamorphoses de l’objet cause du désir dans la langue elle-même ; conjoignant ainsi érotique et poétique. La soumission précoce à la pornographie n’est pas fatalité.
Une réserve néanmoins et pas des moindres concernant la sexualité féminine : peut-on parler d’un fantasme au féminin ? Il faudra attendre le séminaire Encore pour voir se dessiner une réponse, mais qui n’a pas eu beaucoup de retombées dans le champ de la culture et de la psychopathologie de la vie quotidienne tout simplement.
Le fantasme, fenêtre d’entrée sur l’ensemble du monde sensible, est également nourri et construit par les grands discours sociaux ; il se doit d’être constamment actualisé dans notre théorie pour ne pas verser dans un conservatisme ou une idéologie.
Jean-Jacques Tyszler est psychiatre et psychanalyste ; médecin directeur du CMPP de la MGEN à Paris, unité dans laquelle il dirige un séminaire sur les questions de l’exil.
Il est membre de l’école psychanalytique de Sainte-Anne, de l’école de Ville-Évrard (formation à une approche psychanalytique en psychiatrie) et de la Fondation européenne pour la psychanalyse.
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