Coronavirus : corps au virus
- Par ROUGEON M.
Le 1er décembre 2019 à Wuhan, la capitale de la province de Hubei au centre de la Chine, l’apparition de ce qui sera d’abord appelé le Coronavirus puis Covid-19 est déclarée. Depuis le 23 janvier onze millions d’habitants se trouvent sous la contrainte du confinement décrété par l’État, mesure qui sera rapidement étendue à toute la Chine. Le 23 février c’est l’Italie, le premier pays en Europe, qui se réveille avec onze communes confinées pour lutter contre la propagation du virus. La France commence à s’inquiéter et à s’organiser et le 16 mars au soir, le Président de la République, lors de son allocution télévisée, annonce aux Français le confinement à partir du lendemain à midi. Depuis le 11 mai et le 2 juin sont deux dates qui ont jalonné ce que nous nous accordons à nommer le déconfinement.
Je trace ces références aux temps écoulés, prenant appui sur des échanges avec mes collègues du Cercle de Psychanalyse du Caraïbe, avec qui nous avons proposé, dans une lettre adressée au Ministère de la Santé en Colombie, de partir de la référence à ce que Lacan a nommé les temps logiques, à partir du « mouvement du sophisme : l’instant du regard, temps pour comprendre et moment pour conclure(1) », tentant d’arriver à quelques considérations qui mériteraient d’être relevées au sujet de la pandémie que nous vivons au niveau planétaire.
CHARLIE : MORT DE OU POUR RIRE
- Par María Tuirán Rougeon et Philippe Candiago
Le 7 janvier 2015 la France a été frappée de plein fouet par un violent attentat qui est venu ouvrir une nouvelle page de l’histoire de l’intolérance et de la radicalisation, touchant le cœur même de la démocratie à la française : la liberté d’expression et la laïcité. Des jeunes extrémistes, au nom de leur allégeance à un groupe Islamiste radical, s’en sont pris aux membres du journal satirique Charlie Hebdo. Cet attentat s’est produit alors que l’Europe, et tout particulièrement la France, se trouve être, depuis quelques années le théâtre et l’objet d’attaques Islamistes, aux motifs de mœurs perçues comme dépravées : l’égalité homme-femmes, la libération du tabou autour du sexuel, la société de consommation, le principe de laïcité, tous interprétés comme l’expression de la mécréance.
Jeunes filles voilées : trait, retrait ou détresse identitaire ?
- Par ROUGEON M.
Nous vivons depuis quelque temps sous le régime de la radicalisation dans nos tranquilles villes françaises. Elle se met en place sous nos yeux, sans que nous puissions le percevoir, sauf au moment où les événements nous saisissent ; oserai-je dire quand ça cogne. Même les éducateurs qui sillonnent les rues de certains quartiers dits « sensibles », ne perçoivent pas toujours le processus. Je me suis souvent demandé s’il s’agissait d’une espèce d’adaptation opérée par les éducateurs à leur public, là où ils sont censés accompagner les jeunes à prendre part à la table des adultes et à s’inscrire dans un lien social.
L’identité laïque
- Par AREL P.
Conférence de Pierre Arel du cycle Psychanalyse dans le champ social de 2014 - 2015
Les attentats de cet hiver en France nous ont cruellement rappelé la virulence des conflits identitaires et leur cortège de morts. S’ils nous ont néanmoins surpris, ce n’est pas par ce qu’ils mettaient en jeu des affirmations belliqueuses de groupes identitaires, mais au-delà par une focalisation nouvelle sur une certaine forme de laïcité qui a été visée en la personne de ces journalistes, qui s’étaient fait les champions d’une critique de toutes les affirmations identitaires. C’est cette laïcité que nous avons retrouvée dans la manifestation qui a suivi ces attentats, dans un rassemblement silencieux. Ce rassemblement, outre qu’il nous rappelle que nous avons dans notre pays une tradition laïque, soulève des questions sur la place de la laïcité au milieu de ces affirmations identitaires et de leurs conflits.
Questions : Peut-on parler d’une identité laïque ? Et si oui, sur quoi fonderait-elle son message ? Et quel serait ce message ?
Pas d'égalité sans différence, pas de différence sans égalité
- Par ROUGEON M.
Dans le cadre de l’analyse de la pratique, des éducateurs de prévention me parlent de ce délitement du lien social qu’ils observent au quotidien sur des territoires dits « prioritaires ». Il y a deux points qui interrogent l’oreille de l’analyste et que je reprendrai ici :
1. Le communautarisme qui s’exprime d’une manière localisée par quartier ; les uns semblent vivre dans l’ignorance des autres et dans la défense du territoire : « ici c’est chez nous », un « chez nous » qui ne renvoie pas au territoire français, mais à une inscription culturelle autre, dans un retour à des traditions appuyées je dirais sur un registre imaginaire. Ils semblent fonctionner, pour une part d’entre eux, dans une espèce de système où ce n’est pas la loi de la cité et donc référencée symboliquement, mais une loi qui définit un « entre soi » qui émerge comme une riposte à ce qui pourrait être considéré comme le discours du Maître, du maître colonisateur dans le passé. Ils s’inscrivent donc dans une certaine ignorance à l’égard de ce qui constitue le « savoir vivre ensemble », défini pas les lois de la République. Ces territoires sont ainsi devenus des lieux où le commerce souterrain, parallèle, illégal, prend toute la place au vu et su des tous, jusqu’à pouvoir afficher : « Le commerce est momentanément fermé, nous reviendrons bientôt » sur un arbre, suite à l’intervention de la gendarmerie qui a donné lieu à l’arrestation de tenants du trafic local. Face à cette ignorance des lois communes, la société moderne semble vivre dans l’indifférence de ce qui se joue au quotidien sur la cité : « Ce n’est pas chez nous que ce type de choses peut avoir lieu ». À quelle catégorie analytique peut bien renvoyer cette indifférence ?
Problème actuel de la transmission
Il semblerait que la transmission soit en crise, que dans notre culture nous rencontrons un certain nombre de problèmes, dont on se plaint, dont on se désole, mais la plupart du temps sans chercher à voir un peu plus loin où se trouve la question. Il est certain que si nous voulons, si nous cherchons à trouver un remède, il faudrait au moins connaître la nature du symptôme qui est en jeu dans la transmission. Vous avez sans doute pu entendre dans certains propos dans notre association que la transmission était impossible, qu'elle ne se faisait pas, je crois qu'on peut émettre quelque doute puisque quand même depuis Freud, 1895, jusqu'à aujourd'hui quelque chose s'est transmis en cent vingt ans.
L'altérité : enjeux et difficultés
Conférence donnée dans le cadre du groupe de travail Psychanalyse dans le champ social, L’altérité : enjeux et difficultés
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L'altérité n'est pas une donnée simple qui se définirait par la présence de l'autre. Par exemple ce peut-être, pour un psychotique, un frisson ; pour l'aîné, une angoisse ; pour un candidat à un travail, un trac ; pour l'étranger, une inquiétude ou un désarroi et pour l'analyste, assurément un souci. On peut poser la question de la diversité de ces affects qui surgissent au moment de la rencontre avec cet autre, que cet autre soit concret, dans une réalité provisoirement énigmatique ou bien qu'il soit familier voire, encore plus avant, qu'il soit absent. De toute manière, cet autre fait toujours question dans la relation habituelle. Sur un autre versant, le sujet qui se sent interpellé devant l'autre dans ses habitudes et ses conventions, on va dire celles de sa propre névrose, au fond, à y regarder d'un peu plus près, on s'aperçoit très rapidement que le modèle habituel de l'altérité, celui du sujet en relation avec un objet, autant que celui du sujet à sujet sont également défectueux.
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L'acte médical, évincé par les protocoles de santé publique
- Par FRANCE I.
Les derniers scandales du médicament sont l'occasion d'interroger les tendances qui affectent aujourd'hui le champ de la médecine. Dans nos démocraties marquées d'une dépolitisation au profit d'une gouvernance gestionnaire, la santé constitue une attente majeure et l'on conçoit difficilement de ne pas mourir en bonne santé.
LA CONDITION HUMAINE N'EST PAS SANS CONDITIONS
- Par LEBRUN J.-P.
Intervention à Sainte Tulle (Alpes de Hte Provence) le 18 février 2012
...Je vous propose de partir d'une anecdote qui m'est arrivée il y a quelques jours et qui m'a tout à fait intéressé. J'avais invité une collègue qui s'appelle José Morel Cinq-Mars, qui vient d'écrire un petit ouvrage que je vous conseille d'ailleurs, qui s'appelle Psy de banlieue. Elle est psychologue clinicienne d'origine canadienne, et rend compte de comment elle travaille en référence à la psychanalyse, et je dirige moi-même depuis maintenant bientôt cinq ans un séminaire que j'appelle la clinique du quotidien. Je ne vais pas développer ça, mais c'est un travail avec des gens qui sont dans les situations les plus concrètes possibles, et avec l'idée de voir comment, éventuellement, ils pourraient tirer profit de se repérer un peu par les interventions des analystes, et de l'analyste que je suis, qui est présent à cette affaire, et qui les laissent parler des difficultés concrètes auxquelles ils ont affaire...
Le fondement réel dans le lien social
Je vous propose de parler du fondement réel du lien social. Vous avez tous pu remarquer que la rencontre avec un autre lors des entretiens que vous pouvez avoir, ceux que vous avez ou ceux que vous êtes appelés à avoir, à écouter, que cette rencontre ne se fait jamais ou exceptionnellement dans des modalités qu'on pourrait qualifier de simples et de normales. Cela signifie que l'approche de l'autre est profondément problématique. C'est cette problématique que je vais ce soir m'attacher à expliciter à partir de certaines références.
REMARQUES À PROPOS DU TRAVAIL SOCIAL À L'HÔPITAL
- Par REYDELLET M
L'hôpital a évolué à travers les siècles et son orientation à chaque période est révélatrice des valeurs de son époque : d'un refuge pour les déshérités nous sommes passés à une entreprise de soins orientée vers la recherche et la performance.
Hier assisté, le malade est devenu un client, un assuré social et ce qui se trouve menacé, à trop vouloir reproduire une logique industrielle, c'est la dimension subjective.
Il faudrait que l'on fonctionne sur le même mode qu'une entreprise ; on nous impose des procédures sans cesse plus compliquées à mettre en œuvre qui demandent de perpétuels réajustements ; c'est une lutte constante à mener, - dans cette machinerie qui tend à effacer le sujet... tout en réclamant son bien-être - si l'on veut conserver un peu de jeu, de souplesse pour qu'une rencontre puisse advenir.
Sujet avec demande, sujet sans demande
Groupe de travail : Psychanalyse dans le champ social. Jeudi 15 octobre 2009
La demande est une situation tout à fait familière de notre clinique analytique. Il y a bien entendu demande de soins, demande d'éclaircissements, demande afin de trouver son chemin dans l'existence, demande affective et puis aussi, l'absence de demande que nous constatons à certains moments des cures, ou restriction posée sur la demande. Tout cela nous concerne tout à fait au quotidien.
Pour le prendre depuis très loin, je dirai que, bien entendu, vous qui travaillez dans le social vous avez cette question sans doute présente à l'esprit sans cesse. Ceux qui sont amenés à entrer dans les institutions, la question se pose immédiatement de la nature effective de leur demande, sa nature et puis aussi son inscriptibilité possible dans le cadre de l'institution. Vous avez tous expérimenté sans doute qu'il est des demandes dans l'institution que l'on ne saurait satisfaire d'aucune manière alors que l'institution a été mise en place pour un type de demande particulier. Vous avez aussi pu remarquer que dans un certain nombre de cas cette demande est partiellement voire totalement absente, absente au moins dans sa manifestation, dans son expression auprès de ceux qui accueillent. Autrement dit, ce terme est au fond celui qui introduit le début de l'échange ou le début du non-échange et des problèmes suscités par cette absence de demande.
Qu'en est-il de la réponse aux situations de précarité aux urgences ?
- Par DALBO ROHRER D.
Quelle complémentarité entre médecins et acteurs du champ médico-social aujourd'hui ?
Je me suis proposée pour intervenir aujourd'hui en raison du travail que j'ai effectué au service des urgences psychiatriques du CHU de Grenoble et de mon intérêt pour la question de la santé mentale dans la cité.
Le transfert est-il une nécessité dans l'enseignement ?
- Par TOUTAIN M.-C.
Journées de Gap - 2 et octobre 2004
Maryvonne Febvin m'avait invitée à venir parler ici du transfert, comment il est pris en compte dans les théories cognitivistes de l'enseignement. A vrai dire ce n'était pas vraiment la question qui me préoccupait et je m'excuse de ne pas répondre tout à fait à son souhait, tout au moins de manière directe.
La question qui m'intéressait est, à la fois plus générale et plus basique. Elle porte essentiellement dans le champ de l'enseignement scolaire.
Des « explications sexuelles données aux enfants »
- Par PERONNY D.
Journées de Gap - 2 et octobre 2004
« …il est indispensable que dès le début, on traite ce qui concerne la sexualité comme les autres matières dignes d'être connues. C'est à l'école d'abord qu'il appartient de ne pas éluder la mention qui a trait au domaine sexuel ;… »
Ces propos ne sont pas issus de la dernière circulaire du ministère de l'éducation nationale, ils nous viennent de Freud et ils auront bientôt cent ans.
Orient-express
- Par RIVET C.
Journées de Gap - 2 et 3 octobre 2004
Je vais parler de la question de l'enseignement et de la transmission à partir de mon expérience dans un centre de formation pour adultes où j'interviens en tant que psychologue pour le conseil et l'orientation. Je suis là pour écouter, conseiller, orienter les demandeurs de formation, et aussi pour établir avec ceux qui en font la demande un lien permettant de parler des questions, difficultés ou incertitudes qu'ils rencontrent dans leur choix d'orientation professionnelle.